Do what you want, do what you need honey { Aidan}

Les nerfs à vif, elle avait décidé de sortir seule pour se calmer. Le responsable ? Cet imbécile de Travis. A force de les voir toujours fourrés ensemble, les gens commençaient à jaser et à se poser des questions et il en avait dû en avoir assez qu’on vienne lui demander s’ils étaient ensemble puisqu’il l’avait appelé pour annuler leur soirée, histoire de calmer le jeu et qu’on lui fiche la paix. Il semblait avoir oublié qu’on ne posait pas de lapin à Médusa sans en payer chèrement les conséquences, tout comme il paraissait avoir complètement omis le peu de bonnes manières qu’il possédait pour la prévenir à la dernière minute. Si elle fit mine que ça lui était parfaitement égal, une fois qu’elle eut raccroché le combiné du téléphone, ce fut une toute autre histoire et son appartement subit les conséquences de sa colère. Dans un élan de conscience, elle réalisa que dévaster son appartement n’arrangerait en rien son affaire et préféra filer à la douche plutôt que de continuer, ne manquant pas de se dire que c’était bien fait pour elle, quelle idée d’essayer de s’attacher à d’autres personnes, elle était la preuve vivante que ça se terminait toujours mal. On ne l’y reprendrait plus, elle s’en faisait le serment. Si elle adorait faire souffrir les autres, il y avait des choses dont elle préférait se passer.

Vêtue le plus simplement du monde, elle s’arrêta d’abord dans un bar à la mode, rencontrant des gens qu’elle connaissait de vue et d’autres qu’elle ne connaissait même pas, tous contents de lui parler et de se faire voir avec une des personnalités les plus en vue du coin. Quand elle en eut assez de cette ambiance pleine d’hypocrisie, elle choisit un crétin parmi la foule de débiles profonds qui lui collait aux basques et l’invita à la suivre au Paradise Night, histoire de prolonger la soirée et d’effacer le goût amer que le rejet avait laissé sur sa langue. Doo ne supportait pas être seule, autant qu’elle détestait qu’on la rejette aussi violemment que son ami l’avait fait et pour conjurer le sort, elle ressentait le besoin de se faire désirer, par n’importe qui, du moment qu’il était prêt à faire tout ce qu’elle demandait. Ce problème ne datait pas d’hier malheureusement et lui avait toujours valu pas mal de problèmes.

Quand son père avait mis les voiles, il avait laissé un véritable vide affectif qu’aucune autre personne ne fut capable de remplir jusqu’à présent. Enfant, elle avait exorcisé ça en faisant souffrir les autres, les animaux surtout et adolescente, s’était en se laissant aller dans les bras d’hommes ou de garçons de son âge, essayant de retrouver un peu de ce qu’elle avait perdu. Terriblement humain comme mécanisme, pathétique à souhait. Quand on lui posait la question concernant ses nombreuses conquêtes, elle se contentait de répondre qu’elle aimait la vie et tout ce qu’elle pouvait lui offrir, c’était faux, elle méprisait tout ces types autant qu’elle détestait son attitude à certains moments mais tout dans cette vie était une question d’attitude et de choix des mots. Si elle parvenait à se convaincre de ses propres mensonges, elle ne voyait pas pourquoi les autres ne goberaient pas le ramassis de conneries qu’elle déblatérait à chaque fois qu’on lui posait des questions un peu trop intimes.

« Rends toi utile, va commander une bouteille de champagne tu seras gentil Chad ! » fit-elle avec autorité
« Je m’appelle Brad. » répliqua-t-il, exaspéré qu’elle n’ait pas écouté un traitre mot de tout ce qu’il avait bien pu lui raconter

Oh que si elle l’avait entendu se lamenter pendant près d’une demi heure sur son ex petite amie qui ne comprenait pas pourquoi il avait voulu faire le grand saut et devenir mannequin. C’était toujours le même problème avec les provinciaux qui montaient pour devenir des stars, ils étaient trop gentils, trop naïfs et surtout pénibles à souhait, elle préférait de loin les idiots, au moins, ils évitaient de trop parler pour ne pas que ça se remarque et on pouvait au moins optimiser la soirée un maximum. L’éloigner d’elle pendant quelques minutes était nécessaire pour qu’elle ne finisse pas par l’étrangler une bonne fois pour toute pour qu’il la ferme définitivement. De sa démarche féline, elle s’installa dans le carré VIP, accoudée à la rambarde, elle regardait la masse d’inconnus qui grouillait en bas, se déhanchant et s’enivrant pour oublier leur quotidien morose. On s’installa à ses côtés et un parfum familier chatouilla ses narines ce qui la fit sourire.

« Tu as réussi à te débarrasser de mon prétendant ou tu es juste venu me saluer ? » s’enquit-elle sans même tourner les yeux vers lui

« J’espère au moins que t’as ramené du champagne, sinon je me passerai volontiers de ta compagnie. »

Tous ces gens qui venaient s’entasser les uns contre les autres pour oublier leur vie pathétique parmi les autres représentants de leur communauté la ramenaient à sa propre condition. Elle n’était pas là par hasard, la souffrance humaine avait toujours eu un effet apaisant sur elle et calmait son tempérament de feu lorsqu’elle menaçait d’exploser. D’une certaine façon, se dire que tous ces insectes pouvaient être à sa merci, si elle le décidait, emplissait son cœur d’un doux sentiment de toute puissance. C’était sa drogue, le contrôle. Qu’il s’agisse de la maîtrise de sa vie, de celles des autres, de son environnement ou tout simplement de sa carrière. Elle ne vivait que pour ça, se sentant toujours plus importante quand elle possédait un tant soit peu de pouvoir et que celui-ci s’accroissait. Mais cette volonté farouche d’être à la tête de tout l’isolait des autres, on la jalousait, la méprisait, pour un tas de raisons et elle effrayait les hommes. C’était la partie qui l’amusait le plus. Tous ceux qu’elle fréquentait possédaient un ego bien trop surdimensionné pour accepter que ce soit une femme qui prenne les devants plus d’une nuit et décide de tout et surtout du moment où ils se feraient jeter. Ce n’était pas faute d’avoir essayer mais il semblait que sa tendance à l’indépendance la rendait aussi insupportable qu’une tripotée de gosses ayant pris du speed et son incapacité à s’attacher rendait le problème plus compliqué encore. Comment pouvait-on aimer une sans cœur ? Certes on pouvait trouver des avantages à la fréquenter mais sur le long terme, tous ceux-ci semblaient bien moins intéressants e attractifs qu’au premier jour. Elle devenait d’une transparence à pleurer et on se lassait d’elle. Pas de doute, on ne l’y reprendrait pas. Aujourd’hui, elle se contentait d’amants par ci par là, pour sa propre santé mentale et par amour de la liberté.

Fort heureusement pour elle, il semblait que ses deux amants les plus réguliers, oui, ils pouvaient se féliciter d’avoir dépassé le stade d’une seule nuit, voyaient les choses de la même façon que Medusa, lui épargnant des conversations sans fin et une jalousie qu’elle n’aurait pas supporté. Ce n’était un secret pour personne, la brunette adorait les hommes et quand une occasion se présentait, elle ne se montrait pas assez stupide pour la louper. Elle n’avait jamais appartenu à personne et ne comptait pas s’enchaîner à qui que ce soit un jour, elle ferait partie de ces vieilles peaux friquées qui, à 60 ans, ont encore de beaux hommes de 25 ans dans leur lit. Oui, elle aimait cette perspective d’avenir. Après tout, ça n’étonnait personne de voir un vieux milliardaire s’afficher avec une poupée barbie, pourquoi se priverait-elle ?

Enfin, elle daigna porter son attention sur son nouveau compagnon pour la soirée, lui offrant un regard plein de sous entendus tandis qu’un léger sourire s’affichait sur ses lèvres pleines. Ce fut le moment que choisit Kyle ou Chuck ou … ? Elle ne se souvenait plus de son prénom mais ça n’avait aucune importance puisqu’Aidan le congédia en quelques mots ce qui lui fit lever les yeux au ciel. On ne décidait jamais pour la jeune femme ou on pouvait craindre ses foudres, pourtant, sur son visage, il n’y avait aucune trace de colère, juste une expression amusée. Il faudrait que le blondinet lui propose quelque chose de bien plus amusant que ce qu’elle avait prévu pour qu’elle décide de changer ses plans et ne l’abandonne pas dans le carré VIP avec son champagne et ses mauvaises manières. Pour le moment, il n’avait gagné que le temps qu’elle termine son verre, rien de plus. Docilement, elle le laissa trinquer, bu une gorgée de champagne avant de baisser les yeux sur sa main qui explorait sans retenue ce qu’elle n’avait pas envie de céder si facilement ce soir. D’un geste rapide, elle se saisit de sa main et l’éloigna d’elle, un brin vexée par sa remarque.

« J’ai toujours eu bon goût, sauf peut-être la fois où je t’ai laissé m’approcher Aidan ! » dit-elle avec un brin de cynisme

En un clin d’œil, elle avait posé son verre sur la table et s’approcher de lui, assez pour qu’elle n’ait pas besoin de hurler à cause de la musique. Plantant son regard azur dans le sien, elle ajouta, de ce même ton emprunt de défi :

« Je ne suis pas ta chose, ne penses pas pouvoir débarquer ici et me dicter ce que je dois faire, qui je dois mettre dans mon lit et comment ! Tu as fait une grossière erreur en débarquant ici en terrain conquis, tu devrais te souvenir que je n’en fais qu’à ma tête et que je n’accorde pas mon attention si facilement, même à toi. »

Après quelques secondes passées à le fixer sans ciller, elle finit par s’éloigner et s’enfoncer dans la banquette, reprenant son verre pour le déguster, fière d’avoir repris la main et de le faire mariner. Elle jouait à quitte ou double, il était au moins aussi impulsif qu’elle, s’il se sentait insulté ou humilié, il partirait mais elle comptait sur son amour du jeu et son besoin de la dominer pour rendre cette soirée plus intéressante et voire même explosive. Aidan faisait parti de ceux qui pensaient pouvoir dompter la tigresse, elle était curieuse de voir comment il s’y prendrait.

« Alors, je suppose que tu as des propositions alléchantes à me faire si tu as congédié ma seule source de divertissement ? » s’enquit-elle alors que ses yeux s’accrochaient à un grand brun, loin d’être moche, qui traversé le carré VIP, les yeux rivés sur elle

Quoi qu’il décide, il y aurait toujours une solution de secours, elle le savait.