aidan ezekiel fergusson — some of them say i\'m not an human. finished

Mise en situation.

Les regards semblaient s'accrocher sur moi; me détailler; me sonder. J'avançais félinement à travers la foule qui se retournait sur moi. Cela tenait plus à mon costume d'un blanc immaculé qu'à la pâleur de mes iris bleus ou ma peau marmoréenne. « D'où sort donc ce garçon; que son attitude est déplacée ! » Je les entendais déjà murmurer; s'affliger d'un tel comportement. Mon visage habituellement impassible affichait une joie que je ne souhaitais dissimuler. On se décalait sur mon passage, comme si j'étais porteur d'une maladie affreusement contagieuse. La honte que ressentaient mes proches était palpable, mais quelle importance ? Je n'avais pas pour habitude d'agir pour le « paraitre » et qu'importe l'événement auquel j'assistais en ce jour, le blanc semblait convenir selon moi. La célébration d'une mort tant attendue, je ne comptais pas cacher ma joie et mon soulagement. Cela devait bien se finir un jour; nous mourrons tous un jour et j'avais attendu bien trop longtemps pour voir cette mort là.

« Aidan Ezekiel Fergusson ». Mon patronyme entier résonna dans la minuscule chapelle aménagée pour l'événement. Je me retournais avec grâce et aperçu ma mère qui se ruait vers moi. Le kilo de bracelets qui enserraient ses poignets cliquetait au rythme de sa démarche cadencée et rapide. Mes fines lèvres s'étirèrent en un sourire satisfait face à la vision de cette furie, harpie qui venait s'abattre sur moi à une vitesse foudroyante. Ses longs cheveux blonds et lisses frappaient ses épaules à mesure qu'elle s'avançait vers moi et malgré la colère qui déformait ses traits, ma mère restait superbe. Il était évident que nous étions liés par le sang. Ces mêmes yeux myosotis, cette même peau marmoréenne, ce même visage aux traits fins qui semblait gravé dans le marbre et cette même chevelure d'un blond doré à faire envier Boucles d'Or.

AIDAN - « Bonjour maman. »

Mon ton poli était teinté d'un poil de désobligeance, ce qui l'avait toujours rendue folle. J'aimais ma mère autant que je la haïssais. Cela pouvait paraitre cruel pour quiconque ne connaissait pas mon histoire dans son ensemble; tout le monde en quelque sorte. Je l'aimais pour son originalité, sa douceur, son ouverture d'esprit. Ma mère était « médium »; son métier consistait à redonner de l'espoir aux gens; comment la blâmer ? J'avais vécu mon enfance dans la magie, entouré d'elle de toute part, pourtant je n'étais pas certain d'y croire, mais il était évident que je ne pouvais la renier. Comment l'aurais-je pu ? Mais je haïssais cette femme pour sa faiblesse, sa naïveté et sa fragilité. Elle était le genre de femme à voir que ce qu'elle ne voulait, à croire que le monde était d'un rose pâle et pur, encore enfant, croyant aux contes de fées et à ces histoires de gamines. Le genre de femme à laisser son enfant dans la souffrance et à ne rien voir ni entendre par peur que son rêve se transforme en cauchemar. A ne rien dire et à se soumettre par crainte d'être abandonnée une fois de plus.

LAYLA - « Aidan, Aidan. Mon Dieu tu es à l'enterrement de ton beau-père ici. Tu aurais pu faire un effort et te vêtir de noir .. Ou au moins à ne pas afficher cet horrible sourire satisfait sur ton si beau visage .. »
AIDAN - « Alors tu me connais si peu maman ? Pourquoi faire un quelconque effort alors que cela fait des années que j'attends ce jour. »

Sa main s'abattit si rapidement sur ma joue que je n'eus pas le temps d'en prendre conscience. Je restais impassible tandis que ses yeux s'emplirent de larmes. J'ancrais mes iris d'un bleu pâle dans les siens semblables.

AIDAN - « Ce n'est pas de la tristesse que je lis là, n'est-ce-pas ? Cela a plus le goût de la culpabilité. Il t'en a fallut du temps et j'espère que tu crêveras avec. Vingt années de culpabilité cela doit faire souffrir et peser énormément sur la conscience tu sais ?»
LAYLA - « Je t'interdis .. »
AIDAN - « Qu'est ce que tu m'interdis exactement ? D'être en colère, de te détester autant ? N'est-ce-pas que simple justice après toutes ces années ? Toi, la magicienne, n'étais-tu pas censé arrêter tout ça d'une simple formule magique ? »

J'avais prié tant de fois, enfant, pour qu'elle stoppe tout ça, pour que d'une incantation elle fasse s'enfuir ma peur et toute ma souffrance. Mais ce n'était jamais arrivé, pourtant je n'avais jamais perdu espoir jusqu'à ce que l'adolescence m'attrape et que je me rende compte oh combien j'avais étais naïf; oh combien elle était faible et impuissante et que sa magie n'avait pas d'effet sur ces choses là.

AIDAN - « Je suis simplement venu te dire que je m'en vais. En réalité je ne suis pas là pour lui; bien que l'idée de lui cracher au visage m'ai traversé l'esprit. Je t'aime, je te hais maman. Bonne journée, et adieu. »

Je l'embrassais sur le front, elle fondit en larmes et je tournais les talons. De ma démarche féline je fendis la foule qui s'était amassée un peu plus loin pour nous regarder. Je passais les porte de la chapelle sans un regard en arrière. J'attrapais les valises qui m'attendais au pas des deux immenses portes de frêne et m'engouffrais dans la taxi qui m'attendais depuis mon arrivée. Direction Haverleigh.